jeudi 29 mars 2007

Kathy

Je mange. En cachette. Je suis tapis dans un coin sombre comme un vampire. Je bouffe ma sandwich de beurre d'arachide.
Il y a quelques mois, j'ai découvert que l'auditorium n'était pas fermée à cléf sur l'heure du dîner. Je me dépêche d'y entrer à la fin des cours, et je monte sur la palissade des techniciens. Il y en a jamais et je peux parfois même admirer du théâtre. Souvent, je sèche les cours et y reste pour l'après-midi. Je ne me suis jamais fait prendre.

La porte s'ouvre. Kathy Grenier scrute les sièges, la scène, l'arrière-scène, se recroqueville sur elle-même et pleure. Elle se croit seule, pas difficile à deviner. Je vais rester cacher, je ne dirai rien.

-«Tu pleures pour un connard.»
L'idiote se tourne vite-fait vers la porte. Victime traquée son regard fouille le vide de la salle. j'adore la voir si moche.
-«C'est qui?» Elle se lève, il est vrai que c'est atroce de se faire surprendre dans notre solitude. Du moins lorsqu'elle est recherchée. J'devrais me taire. J'aurais du fermer ma gueule.
Je prend une bouchée de mon festin pour mieux réfléchir à ce que je ferai. Comme l'idée naît de rester cacher et attendre qu'elle s'imagine avoir eu une hallucination, j'échappe le reste de mon sac sur la scène. Le type de truc qu'on croit voir arrivé que dans les films. Je m'en veux. Quelle merde je fais ...
Elle scrute ma marque de chaussure par en-dessous.
-«Comment t'as fait pour monter là?» Si je parle, elle va me reconnaître, j'en suis certain. J'ai les machoîres qui me font mal depuis la dernière fois qu'elle est aller raconter des trucs sur moi, j'ai très peur de voir empirer mon cas. Ensuite, il me parait inévitable que mes mots s'enfargeront dans le vide amer de mes hésitations. Il n'y a pas moyens d'échapper à Cricket.
-«Heille parle-moi!» Bien sur! On doit répondre à Miss Kathy .Je prépare lentement ma réplique pour ne pas la manquer.
-«Vas a gauche». Je me lève, j'suis dans la merde. Je panique, j'ai chaud, je sue, je manque planter encore, une autre fois, puis une autre. Elle est en bas, tentant d'attraper la bordure qui m'a aider à monter. Je lui tend la main.
-«T'as donc les mains douces.» Ne t'en permet pas trop, pauvre fille, tu vas tomber tout a l'heure sinon. L'idée que je me fais de sa réaction me donne l'envie de vomir. C'est du stress. Vomir d'angoisse ca se peut ?
«Bon, le temps des présentations!» Elle enchaîne trop vite à mon goût. Dans sa hâte, il y a l'espoir. L'espoir fou que je ne sois pas moi. Que je sois un de ces cons pour qui elle craque.
-«Je dois t'intimider...je m'appele Kathy Grenier.»
-«...et tu pleures?...» *** Qu'elle aille se faire voir avec son intimidation.***
-«J'aurais préféré ne pas revenir sur le sujet... mais je viens de découvrir que mon chum me trompe...Une grosse pute, j'te dis, si je la vois j'la fesse. » Elle prend une pause pour chialer un peu, renifler et soupirer. «Le pire, c'est surement de croire en quelqu'un mais de finalement se rendre compte qu'c'est pas lui notre héros.»
*** Mais pourquoi un héros? Pourquoi les filles en ont besoin?***
«J'sais meme pas pourquoi j'te racontes tout ça à toi. En tout cas, c'est plus facile de raconter à des étrangers... Dis-moi t'es qui!»
Elle regarde mais, comme pour elle, il doit n'y avoir que mes yeux qui brillent un peu.
-«J'aime tes yeux...»
-....«Chuuuuut».... Kathy divague, elle va tomber en bas de la poutre. Se planter à cent mille à l'heure, ça fait bobo la belle! J'suis écoeuré. En plus, ça sent l'odeur qui me décourage chaque fois; celle des gens dont je n'ai rien ;a tirer. Je m'en vais.
Elle gueule. Je fais la sourde oreille. Parles, parles belle commune, mais pour une fois, reste seule pour réfléchir un brin.
C'est arrivé dans la rangée entre les sièges que j'ai entendu son manque à la respiration. Elle sait maintenant qui je suis. Elle fixe bouche bée. Je referme la porte la laissant là, l'air idiote dans son ébahissement.
J'ai une vengeance. Le criquet fatigué des caves, écoeuré des pétasses et embêté par tout ce qui l'enveloppe. Un peu de soulagement pour ma blessure. Maintenant que je suis a l'abris dans la foule, je me sens en sécurité. Jamais elle ne s'humiliera elle-même pour venir me parler devant tout le monde. Maintenant, je me plais à croire que plus jamais elle ne me parlera.

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